Le 23 un grand numéro pour Almodovar
Par Marie Ange Barbancourt
Rédactrice en Chef et Directrice du développement Diamont History Group
Pour son 23e film, La Chambre d’à côté (The Room next Door), un film crépusculaire de Pedro Almodovar lui vaut le Lion d’or à Venise son premier grand prix dans un important Festival. Un grand écho dans le monde entier. Almodovar est l’un des plus grands cinéastes espagnol de son temps pourtant malgré une belle filmographie il n’a jamais eu de récompense ultime pour ses œuvres dans les grands festivals.
Dans The Room Next Door (La chambre d’à côté), le réalisateur plonge dans un univers au parfum funèbre avec force et réflexion face à une troublante réalité, mettant la vie en opposition à la mort. Il poursuit avec ce dernier long métrage son travail sur le sens de la vie.
Le cinéaste qui fêtera bientôt ses 75 ans, a tourné entièrement en anglais. Une première pour lui.
Le film relate l’histoire de deux amies qui renouent leur amitié, une écrivaine à succès Ingrid (Julian Moore) et Martha (Tilda Swinton) jadis correspondante de guerre. Elle souffre d’un cancer en phase terminale et son amie Ingrid va l’accompagner. Elle lui demandera d’être dans la chambre d’à côté quand elle passera à l’acte. Basé sur le roman de Sigrid Nunez what are you going through . Tout ça dans un décor qui rappelle l’Espagne avec des couleurs comme pour déjouer la mort et visuellement bien équilibré dans une splendeur qui fait contraste avec le sujet comme pour mieux faire passer la pilule.
À l’heure où toutes ces questions sont soulevées dans le monde par rapport à l’aide médicale à mourir et mette en opposition le pour et le contre avec tout le dilemme des croyances religieuses. Pour certains choisir sa mort est un acte de suicide. On retrouve cet accès dans très peu de pays Canada, Belgique, Espagne , Luxembourg, Pays-Bas. Almodovar rentre de plein fouet dans le vif du sujet avec ce film crépusculaire sous fond d’amitié. Il prend position et affirme haut et fort son message politique comme à l’accoutumé. il dit que c’est une charge en faveur de l’Euthanasie. Si le réalisateur a déjà abordé la maladie dans son œuvre, il amène là une réflexion sur la mort et le droit de mourir dans la dignité. Il plaide, disant que cela devrait être accessible dans le monde.
On se rappellera brièvement de son parcours car c’est toujours bon de se souvenir.
Dès son jeune âge le cinéma dessinait déjà son chemin de vérité dans son cœur. pourtant ce garçon était destiné à devenir prêtre selon le chemin tracé par ses parents qui l’inscrivent à 8 ans dans un internat Catholique à Caceres (commune en Espagne) loin de la maison familiale dans le but, que plus tard, il suive ce courant religieux. Son père Antonio et sa mère Francisca vont finir par s’établir dans cette commune pour être plus proche de leur fils, lui viticulteur et elle liseuse. À 18 ans Pedro Almodovar, malgré la désapprobation de ses parents, s’installe à Madrid après avoir découvert l’univers de Luis Bunuel qui l’a fasciné et qui plus tard marquera son approche cinématographique (tout comme Fellini). Son envie de devenir cinéaste devra passer par l’autodidactisme pour nourrir son savoir à l’ère Franquiste où l’école de cinéma était carrément fermé. Il s’intéressera au théâtre avec une compagnie indépendante (Los goliardos) comme comédien et c’est là qu’il rencontrera le réalisateur Félix Rotaeta (réalisateur espagnol 1942-1994 et l’actrice Carmen Maura qui sera plus tard l’actrice de son premier long métrage Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier) et s’attachera au cinéma expérimental. On aime bien mentionner la Movida (Mouvement culturel post Franco au début des années 80 en Espagne) dont il a fait partie après le départ de Franco est marquant pour lui. Il devient un membre important du mouvement. Il publie des articles dans des journaux et Magazines, écrit un recueil de nouvelles (El sueño de la razón) Au début de la vingtaine il s’arme de son Super 8 Camera, il en résultera des courts métrages muets avec des récits dont les titres parlent d’eux-mêmes : Deux prostitués (dos putas) la chute de Sodome (la caida de sodoma ). Il fera cinq films avant de passer au 16mm avec Sexo va : sexe viene (Le sexe va et vient) son sixième court métrage. Après cette période, il rentre d’emblée dans le cinéma avec un univers déjà Almodovarien avec ce film en 16mm (gonflé en 35) Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier (Pepi, Luci, Bom y otras chicas del montón) qui dépeint une société débridés où toutes les tendances sexuelles se côtoient sous un fond d’humour absurde. Une carrière est ainsi née, même si à l’époque la critique n’a pas été complaisante. Deux ans après le film Le Labyrinthe des passion (Laberinto de pasiones) avec Antonio Banderas qui est révélé au public, il trace de plus en plus son chemin d’histoire cinématographique avec son narratif. Poursuivant sa quête avec des thèmes privilégiés (la femme, l’homosexualité, la drogue) avec son troisième film Dans les ténèbres (Entre tinieblas) où drogue, complots, sexe se côtoient dans une charge contre les religieux. Film qui lui donnera un statut affirmé et confirmé. Il poursuivra son chemin avec Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter cela (Qué he hecho yo para merecer esto ?) un hommage au néoréalisme italien, puis Matador un film controversé jugé trop violent. En 1987 c’est avec le film La loi du désir (La ley del deseo) présenté à la Berlinale qu’ il obtient un Teddy Awards (récompense cinématographique décernée par un jury international composé d'organisateurs de festivals de films gay et lesbiens aux films qui traitent de l’homosexualité), film où il étale sa vision du désir dira-t-il.
Almodovar nous a, au fil de son chemin, livré un cinéma propre à lui avec des thèmes qui lui sont restés chers au cours des années, Femmes au bord de la crise de nerfs, Attaches-moi, Talons aiguilles, Kika, la Fleur de mon secret, En chair et en os, Tout sur ma mère, un film complexe. le réalisateur traite de la maternité, l’identité de genre, le sida. Un mélodrame qui lui a valu son premier Oscar du Meilleur film international. Parle avec elle, La Mauvaise éducation , Volver un film sur la mort et toute la culture autour. Etreintes Brisés (Los abrazos rotos) un thriller romantique façon Hitchcock qui en 2009 a remporté la palme d’or à Cannes et meilleur film étranger aux British Academy Film Awards et aux Golden globes. Puis viendra un film genre horreur, suspens psychologique La Piel que habito (La Peau que j’habite adaptation du roman intitulé Mygale de l’auteur français Thierry Jonquet) qui obtient un Bafta du meilleur film étranger. Il aura après une comédie, Les amants passagers (Los amantes pasajeros) la critique est mitigée pour ce film. Il revient à son narratif cinématographique avec Julieta, les femmes, l’amitié, du sentiment de culpabilité où il sera en compétition à Cannes. Puis Douleur et Gloire (Dolor y gloria). Un film dans lequel il continue de ficeler ses préoccupations. Dans ce film Banderas est en quelque sorte l’alter ego d’Almodovar, traitant de la mémoire de l’enfance, les rapports complexes, pour le personnage de Salvador, entre la douleur physique et morale, la créativité, l’écriture et le rapport à l’amour. Avec une facture fellinienne. Cette œuvre puissante lui vaudra sa sixième présentation à Cannes avec le prix d’interprétation Masculine pour Antonio Banderas et le film nommé aux Oscars.
Le réalisateur fera un bref retour au court métrage avec La voix humaine inspiré de la pièce de Cocteau avant de commettre Madres paralelas, film d’ouverture à la Mostra de Venise en 2021 avec un prix pour Penelope Cruz. Ce mélodrame est un portrait de femme dans un contexte de mémoire du passé franquiste. Il nous fera un court d’une trentaine de minutes qui traite de l’histoire de deux amants Strange Way of Life deux cowboys qui se revoient après 25 ans avant de nous arriver avec ce film qui reçoit le Lion d’or « La chambre d’à côté » (The Room Next Door) un film puissant que l’on verra sûrement dans liste des nommés aux Oscars.
Réalisateur scénariste et aussi acteur il a aussi incarné quelques films. Il a commis quelques livres, obtenu plus d’une quarantaine de nominations et obtenu 17 prix en tout.
Quel sera le prochain sujet ?
La Chambre d’à côté ( The room next door) un film de Pedro Almodovar avec Julian Moore et Tilda Swinton
Produit par El Deseo (Espagne)
Studio: Sony Pictures Classics
Musique : Alberto Iglesias
Durée 110 minutes
On attend la date de sortie !
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