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Chronique de Cannes 6

Chronique de Cannes 6

Parfum de scandale


Par Serge Leterrier

 

« C'est un endroit bizarre où l'on montre des films qui ne sont pas sûrs de sortir à des gens qui ne sont pas sûrs d'y aller, mais le plus bizarre de la chose, en ce qui concerne Cannes, est le résultat de toute cette effervescence : donner l'envie de voir des films, l'envie de faire des films, l'envie d'aimer les films. » Gilles Jacob

 

Le 77e festival de Cannes a déjà bien entamé sa dernière  semaine et  promet d’être riche en événements. Il reste  encore une pléthore de films internationaux qui concourent pour la prestigieuse Palme d’Or.

 

Parmi les moments les plus attendus des prochains jours, citons la projection de Limonov, porté à l’écran par Kirill Serebrennikov. Les linceuls de David Cronenberg (NDLR : https://www.diamont-history-group.info/post/david-cronenberg), Marcello Mio de Christophe Honoré, Anora de Sean Baker, L’amour Ouf de Gille Lellouche, ainsi que le film qui a déjà diffusé un parfum de scandale sur la Croisette : The Apprentice, que nous allons découvrir ensemble...

Photo Jeremy Strong , Sebastian Stan dans le Film The Apprentice - Copyright Scythia Films

The Apprentice

De Ali Abbasi

 

« Premièrement, ne transigez jamais, n'abandonnez jamais ; deuxièmement, contre-attaquez immédiatement ; troisièmement, peu importe ce qui arrive, peu importe à quel point vous êtes dans la mouise, revendiquez toujours la victoire. » Stratégie de Roy Cohn selon l’auteur Sam Roberts

 

L’histoire

Ce biopic  explore l'ascension de Donald Trump alors qu'il développait ses activités immobilières à New York dans les années 70 et 80. Le film va également considérer la triste amitié ou plutôt le pacte faustien entre Donald Trump et Roy Cohn avocat conservateur, manipulateur et très  controversé pour devenir ce sulfureux avocat du diable. Roy Cohn sera le conseillé juridique  et le mentor de Donald Trump entre 1974 et 1986.

 

Dans une interview accordée à Newsweek en 1979, Donald Trump dira au sujet de Roy Cohn:


« Si vous avez besoin de quelqu'un qui peut devenir vicieux contre vos opposants, vous faites appel à Roy. »

 

Un film s’infiltrant en toute conscience de cause dans les  arcanes du pouvoir pour nourrir les vicissitudes de ce jeune entrepreneur qui deviendra plus tard, président des Etats Unis, mais l’histoire du film n’ira pas jusque-là.

 

The Apprentice ne se contente pas de raconter l'histoire de Trump, il pose également des questions profondes sur les rouages  du pouvoir, de la célébrité et de l'ambition. Il nous invite à réfléchir sur ce que signifie réussir dans la société américaine moderne et quels moyens sont mis en œuvre pour y arriver. Ce n’est pas tant l’histoire de Trump qui est en exergue dans ce film mais la société, ses dérives et sa mécanique pernicieuse qui sont montrées du doigt en se distillant, dans cette histoire, comme une allégorie sur l’ambition à outrance, prenant les traits de Young Donald Trump.

 

The Apprentice est un film qui a fait sensation lors de sa première sur la Croisette, peut-être par cette réalisation  pleine d’audace et de provocation de la vie de Donald Trump, interprété avec brio par Sebastian Stan. Un long métrage réalisé par Ali Abbasi, qui offre une perspective unique sur cet homme qui va porter son ambition démesurée, pour ne pas dire égotique, jusqu’à  la présidence des États-Unis. Stan, avec sa performance bluffante, réussit à capturer l'essence complexe de Donald Trump, oscillant entre cette ambition démesurée et sa vulnérabilité cachée.

 

Les américains verront-il The Apprentice ?

Oui bien évidement  malgré les attaques incessantes, de l’équipe de campagne de Donald Trump  et de l’un des producteurs du film, Dan Snyder qui se dit « trompé par le film », que subit Ali Abassi, le réalisateur irano/danois. Donald Trump menace,  lui-même, le cinéaste pour une scène non consenti avec Ivana. Il  clame haut et fort :  « pure fiction qui fait du sensationnalisme avec des mensonges qui ont été démystifiés depuis longtemps. ».

 

Cannes tient-elle son premier scandale s’épandant comme une trainée de poudre sur la Croisette dont les répercussions ne se feront, je suppose, qu’aux Etats-Unis.

 

Les Echos a également publié une critique du film, notant que "l’histoire est à la fois une reconstitution historique et un miroir angoissé de notre présent". Une judicieuse périphrase qui en dit long sur les effets Trump, aujourd’hui.

 

La projection de The Apprentice, ce lundi 20 mai, a suscité une vague de réactions, tant de la part du public que des critiques. 11 minutes de standing ovation pour cette avant-première. Les critiques ont été impressionnées par la manière dont le réalisateur Ali Abbasi a réussi à dépeindre la complexité du magnat de l’immobilier, Donald Trump. Le Figaro a souligné le portrait saisissant du jeune promoteur new-yorkais avant la tentation politique..

Le public, quant à lui, a été captivé par la performance de Stan. Son interprétation de Trump, avec ses tics et son débit cassant, a été saluée comme une représentation fidèle et nuancée du personnage.

 

Un film controversé à l’image du personnage qu’il décrit !


Photo Demi Moore dans The Substance de Coralie Fargeat - Copyright Working Title

The substance

De Coralie Fargeat

 

Un conte macabre pour une éternelle jeunesse


L’histoire

The Substance  nous entraîne dans le sillage d’Elizabeth Sparkle, incarnée par Demi Moore, ancienne lauréate des Oscars reconvertie en animatrice d’une émission d’aérobic. Après avoir été supplantée par une femme plus jeune par sa production, Elizabeth découvre « The Substance »… C’est à ce moment-là que l’histoire tourne au drame « Gorifiant ».

The Substance se profile comme une aventure cinématographique inédite, violente, horrifique, et intense passant de la perfusion à la transfusion cinématographique.  Le long métrage est réalisé par la réalisatrice française Coralie Fargeat, célèbre pour son premier long métrage haletant Revenge, où l’hémoglobine à profusion s’invite au repas des prédateurs défroqués de leur indigeste cruauté.

Cette nouvelle œuvre nous plonge dans l’univers d’une biotechnologie avant-gardiste, « The Substance », promettant de donner naissance à une sorte de clone au doux nom de Sue (Margaret Qualley),  issue du dos déchiré d’Elizabeth (Demi Moore) en garde alterné avec son nouveau corps, jeune, séduisant, idéal.  Résoudre le problème à trois corps est déjà très complexe en physique, mais s’exprimer avec deux corps qui doivent s’alternés tous les 7 jours, l’une à la maison, l’autre, la plus jeune bien évidement sous les sunlights de l’émission. Une situation qui  n’est pas facile certes, surtout lorsque les choses se gâtent et deviennent ingérables…

 

Au casting, la présence  de Margaret Qualley (Fille de l'actrice américaine Andie MacDowell), incarnant le nouveau fantasme masculin, rôle qu’elle assume parfaitement et de Dennis Quaid (L’étoffe des Héros), campant le personnage  du patron de la chaine de télévision. The Substance offre une perspective féministe et explosive de l’horreur corporelle et des diktats de la jeunesse éternelle. A en croire les différentes réactions, juste  après la projection, le film a secoué le Grand Théâtre Lumière laissant le public dénouer ses sentiments, ses phobies, voire ses aprioris, sortir de ce bain de sang pour se conformer de nouveau à la réalité, qui n’est pas aussi reluisante qu’elle n’y parait.


Coralie Fargeat semble renouer avec un thème qu’elle avait déjà exploré dans son court métrage, Reality+ (2013), où une technologie futuriste permettait de se voir et d’être vu comme un mannequin. Avec The Substance, elle pousse ce concept encore plus loin, explorant les conséquences potentiellement effrayantes de la quête de la perfection.

 

The Substance est déjà considéré, par quelques critiques,  comme un sérieux candidat à la Palme d’Or. Avec son audacieux mélange sanguinolent de science-fiction, d’horreur et de drame, il est certain que cette fulgurante métaphore, transfuge du féminin épinglé par les hommes, ne laissera personne indifférent.

 

C’est sur cette note « politiquement gorecte » que nous laissons, aujourd’hui, Cannes à sa Croisette. Le festival n’est pas fini et peut encore nous réserver de nombreuses surprises. A demain, pour notre 7e Chronique de Cannes

 


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2 Comments


Guest
May 22

👍👍👍

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Guest
May 22

Article excellent bravo

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