DRACULA
- Imanos Santos

- 22 juil.
- 3 min de lecture
DRACULA
Le mythe de l’immortalité selon Besson
Par Imanos Santos
Sombre, lyrique, vertigineux. Trois mots qui condensent l’ambition de Dracula selon Luc Besson.
Sombre, parce qu’il plonge au cœur d’une âme déchirée par le deuil et la damnation, loin des codes ludiques ou folkloriques du vampire.
Lyrique, tant l’image, la musique et le récit intègre une forme d’opéra visuel où chaque geste devient offrande à l’amour perdu.
Vertigineux, enfin, dans la manière dont le film explore plusieurs siècles, plusieurs identités, plusieurs douleurs, jusqu’à perdre ses repères temporels pour mieux toucher à l’éternel.

Projet emblématique de Luc Besson, cette réinvention du mythe de Bram Stoker a pris forme sous le titre Dracula: A Love Tale, porté par une ambition visuelle et émotionnelle inédite dans la filmographie de Luc Besson. Le réalisateur, qui a choisi d’écrire lui‑même le scénario, s’intéresse avant tout à la dimension romantique du récit, transformant Dracula en figure tragique et introspective, tourmentée par la perte et la quête de rédemption.
Le rôle-titre est incarné par Caleb Landry Jones, acteur découvert par Besson lors du tournage de DogMan (2023), dont la présence a inspiré l’écriture même du personnage. Face à lui, Zoë Bleu prête ses traits à Elisabeta au XVe siècle et à Mina à Paris au XIXe — un double rôle conférant subtilité et intensité émotionnelle à sa prestation. Christoph Waltz complète ce trio, dans le rôle d’un prêtre venu affronter le vampire dans une croisade morale voire mystique.
Les décors, dispersés entre la Finlande enneigée (région de Kainuu, non Lapland) et des lieux français — Paris, le Jura, les studios Darkmatters de Tigery — soulignent la dualité temporelle du récit, mêlant paysages gothiques et cadres épurés du XIXe siècle. L’équipe technique réunit des talents du cinéma français : Hugues Tissandier aux décors, Corinne Bruand aux costumes, Colin Wandersman à la photographie, avec des effets numériques signés MPC Paris.
La partition, composée par Danny Elfman — première collaboration avec le réalisateur — décline une atmosphère sonore puissante, puisqu’il s’agit d’un compositeur à l’univers évocateur (entre autres connu pour Batman ou Edward aux mains d’argent). Le budget, estimé à environ 45 millions d’euros, fait de Dracula la plus grande production française de l’année 2025.
La bande-annonce, dévoilée début juin 2025, instaure dès ses images une tonalité sombre et baroque, où le deuil prime sur l’horreur, les crocs sur l’émotion. L’esthétique s’apparente à une peinture gothique en mouvement : costumes d’époque, lumières rasantes, architectures majestueuses et forêts spectrales. Aucun pastiche mais une relecture personnelle, poétique et tragique, de l’œuvre de Coppola tout en affirmant une identité propre.

Le récit commence au XVe siècle : le prince Vladimir, accablé par la disparition de sa femme, renonce à sa foi et cède à la malédiction vampirique. Condamné à l’immortalité, il erre jusqu’au XIXe siècle où il croise à Paris une femme identique à son ancien amour — son obsession renaît, nourrie par la douleur et l’espoir d’une rédemption impossible.
Le film va sortir en France le 30 juillet 2025 et dans plusieurs pays européens ultérieurement, Il cherche à renouer avec le grand public tout en proposant une vision artistique de haut vol. Luc Besson revient au cinéma fantastique de manière assumée, avec l’intention de toucher davantage qu’avec des œuvres antérieures plus confidentielles comme DogMan.
Dracula apparaît ainsi comme une œuvre ambitieuse et équilibrée : spectacle grandiose, personnage introspectif, romance éternelle et esthétique gothique. Un choix audacieux de la part d’un cinéaste français désireux de prouver qu’il peut rêver grand, même dans l’ombre des légendes du fantastique.

En épurant le mythe jusqu’à sa trame la plus intime, Luc Besson propose une traversée des ténèbres où l’éternité n’est ni un privilège ni une malédiction, mais un écho prolongé du manque et de l’isolement. Chaque image semble porter la mémoire d’un amour trop vaste pour la mort, chaque silence résonne comme une prière suspendue. Refusant les oripeaux du spectaculaire gratuit, le film avance à pas feutrés vers une beauté grave, presque sacrée, où l’effroi se confond avec la tendresse. Loin de la créature assoiffée de sang, c’est l’homme brisé que l’on suit, celui qui saigne d’avoir aimé. Et si ce Dracula marque, c’est parce qu’il ne mord pas : il nous susurre à l’oreille ses blessures d'immortel.
Avec Dracula, Luc Besson s’éloigne des éclats de son cinéma d’action pour révéler une veine plus méditative, où la mise en scène devient l’écrin d’une mélancolie souveraine.
BANDE ANNONCE - DRACULA


