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ALPHA

  • Photo du rédacteur: Serge Leterrier
    Serge Leterrier
  • 28 avr.
  • 4 min de lecture

ALPHA

Le cinéma de Julia Ducournau,

Chronique d’une métamorphose annoncée

 

De Serge Leterrier

 

« Avec Alpha, je n’ai pas cherché à choquer, mais à interroger ce qui se cache sous la peau des apparences — cette frontière poreuse entre l’intime et le monstrueux. » Julia Decournau, conférence de presse, Cannes


Quatre ans après sa Palme d’or historique pour Titane, Julia Ducournau revient en compétition officielle à Cannes avec Alpha, film décrit par ses producteurs comme « son œuvre la plus personnelle ». Sélectionné parmi vingt-deux longs-métrages pour cette 78e édition présidée par Juliette Binoche, le projet confirme la place de la cinéaste comme figure incontournable d’un cinéma qui fusionne horreur viscérale et métaphores sociales.


Julia Ducournau capture écran : Conversation avec Julia Ducournau  -  Emission ARTE
Julia Ducournau capture écran : Conversation avec Julia Ducournau - Emission ARTE

 « Ducournau fracture l’écran avec une audace qui dérange autant qu’elle fascine. Alpha est un miroir brisé — chaque fragment raconte une vérité qui effraie. » Critique anonyme d’un des membres du jury cannois

 

Le synopsis laconique — une adolescente de treize ans dont le tatouage déclenche un séisme familial — résume à lui seul l’ADN du cinéma de la cinéaste : le corps comme champ de bataille existentiel. Melissa Boros, révélée dans L’Été dernier, incarne Alpha, plongée dans une «atmosphère de cendres orange et de terre » selon les premières images. Le tatouage, élément déclencheur, symbolise autant la rébellion adolescente que la quête d’identité, thème récurrent depuis Junior (2011), court métrage sur la métamorphose pubertaire.

 

Tourné au Havre en 2024, le film intégrerait une dimension autobiographique liée au sida, selon des sources proches de la production. Une évolution notable pour une réalisatrice habituée aux métaphores organiques, qui semble ici ancrer son propos dans un réalisme plus cru.


Tahar Rahim, corps sacrifié


« Perdre vingt kilos pour ce rôle ? Une évidence. Julia exige une vérité viscérale, celle qui vous arrache à vous-même pour mieux servir l’histoire. » Tahar Rahim, Magazine Inrockuptibles


La transformation physique de Tahar Rahim domine les discussions. L’acteur, déjà méconnaissable dans Monsieur Aznavour, a perdu « vingt kilos » pour incarner un père « au bord du gouffre ». Thierry Frémaux salue une « composition saisissante », tandis que Rahim évoque une « expérience sensorielle qui marque à vie ». À ses côtés, Golshifteh Farahani et Emma Mackey complètent un casting d’acteurs habitués aux rôles tourmentés, choix cohérent avec l’univers de la réalisatrice, où chaque performance confine à l’exorcisme.


De Grave à Alpha : l’obsession du corps mutant


Avec Alpha, Julia Ducournau poursuit une filmographie construite sur la transgression des normes corporelles. Grave (2016), portrait d’une étudiante cannibale, et Titane (2021), fable sur une femme enceinte d’une voiture, ont imposé son style hybride, mêlant body horror et poésie grotesque. La Palme d’or obtenue pour Titane — seulement la deuxième décernée à une femme — avait divisé la critique, certains y voyant un « manifeste cinématographique », d’autres un « déluge chaotique ».


Ce dualisme définit son approche : filmer la chair comme paysage des angoisses contemporaines. Alpha s’inscrit dans cette lignée, mais avec une intimité accrue. « Je cherche désormais la monstruosité dans le quotidien », confie-t-elle. Le choix d’une protagoniste adolescente rappelle Junior, où des écailles reptiliennes symbolisaient la puberté.


Un festival sous tension


La compétition cannoise 2025 aligne des poids lourds : Wes Anderson (The Phoenician Scheme), les frères Dardenne (Jeunes Mères), et Ari Aster (Eddington). Dans ce contexte, Alpha bénéficie d’une attention particulière, moins pour son statut de film français que pour l’aura de la réalisatrice, capable de provoquer scandales et adulations en une projection.

Produit par Mandarin Cinema et Frakas, le film mise sur la fidélité technique : Ruben Impens, directeur de la photo des précédents longs-métrages de Julia Ducournau, garantit une continuité esthétique. Les plans serrés sur les pores de la peau et les lumières blafardes, marqueurs de son style, devraient rythmer cette nouvelle œuvre.


Melissa Boros  (Alpha) I Photo Copyright Diaphana
Melissa Boros (Alpha) I Photo Copyright Diaphana

Entre héritage et renaissance


« Ce tatouage n’était pas un accessoire, mais une seconde peau. Julia m’a appris à voir mon corps comme un paysage de luttes silencieuses. » Melissa Boros, interprète d’Alpha, (source Le Monde)

 

La sortie prévue le 20 août 2025 place Alpha en position de film-événement estival. Diaphana Distribution, qui avait porté Titane à un million d’entrées, réitère son pari sur une réalisatrice dont la radicalité n’entame pas le potentiel commercial.

 

Le challenge pour la cinéaste sera d’éviter le piège de la répétition. Si le tatouage rappelle les métamorphoses de Titane, le contexte familial resserré — une mère et sa fille face au chaos — suggère un recentrage narratif. « Son cinéma gagne en maturité sans perdre sa violence », analyse un critique présent à la projection.

 

En choisissant d’explorer les failles de l’adolescence plutôt que les excès spectaculaires, Julia Ducournau pourrait surprendre. Reste à savoir si Cannes, et au-delà le public, accepteront de se laisser lacérer par ce nouveau miroir tendu à nos propres mutations.

 

 Alpha s'annonce comme l'un des événements majeurs de cette 78e édition du Festival de Cannes, se déroulant du 13 au 24 mai… Restons dès lors à l’heure cannoise.

 

Les critiques de Néo – YouTube - Alpha de Julia Ducourneau ma plus grosse attente de Cannes 2025 !



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